Je Suis Mégane.

Aujourd'hui et depuis quelques jours, plus rien ne me semble réel... Je ne vis plus dans un monde de logique, mais dans un monde cruel, évènementiel, solidaire face à la haine mais haineux face à la solidarité. Un monde où chaque parole, chaque geste, peut devenir une gâchette. Plus rien n'a de sens puisque si peu de gens réfléchissent encore avant de s'exprimer, avant d'agir, avant de tweeter, ou avant d'assassiner. Un monde où on ne cesse de répondre à la violence par plus de violence. Un monde où certains se vantent d'avoir des valeurs dont ils ne comprennent même pas l'essence. Un monde où les gens réagissent  à un scandale parce qu'on leur a dit que c'en était un, et où personne ne s'offusque quand le reste du monde subit des horreurs bien pires au quotidien. Un monde aussi où il est si difficile d'agir, même quand on en a envie ; où les intelligents sont lâches et les cons sont chefs d'États.

En tant que professeur des écoles, j'ai peur. En tant que femme, j'ai peur. En tant qu'être humain, je suis terrifiée.

Je ne sais pas quoi répondre à mes élèves quand l'un me dit que la vidéo de l'attentat "était trop cool" et l'autre me dit que "les gens qui sont morts et qui avaient des familles et bah maintenant leur famille elle va être triste". Je ne sais pas quoi répondre a mes collègues qui parlent de tout ce qui se passe comme du dernier fait divers, comme si ça n'était pas grave, comme si ça ne témoignait pas de la haine et de la violence dont de plus en plus de personnes sont capables, comme si ce n'était rien. Mais ce n'est pas rien. C'est la goutte de trop, c'est la preuve que notre haine nous mènera à notre perte, la preuve que des personnes innocentes vont continuer à payer pour les querelles de certains. La preuve qu'on peut être un homme et être inhumain surtout...

Je ne sais pas quoi penser des personnes qui profitent de ces évènements pour soulever toujours plus de haine, pour s'engouffrer dans une faille et un faire un fossé. Je ne sais pas quoi penser des gens qui se montrent plus solidaires que jamais lorsqu'il y a un mouvement de masse mais qui ne se sont jamais soucié des malheurs que certains subissent au quotidien parce que ça n'était pas en bas de chez eux.

Je ne sais plus si je dois être pour ceci ou contre cela.

Ce que je sais, c'est que j'ai peur que ces évènements ne donnent naissance à encore plus de violence, de discriminations, de haine. Je suis triste que des gens soient morts, et pour quoi ? Je suis triste qu'un si grand nombre de personnes fassent des raccourcis quand ils sont face à une situation si complexe.

J'espère qu'on se relèvera, qu'on arrêtera les conneries, qu'on trouvera les mots, qu'on trouvera des solutions, qu'on apprendra de nos erreurs...

Je ne suis pas Charlie, je ne suis pas Ahmed, je ne suis pas policier et je ne suis pas muslim, mais je suis moi et je pense fort à ceux qui sont partis trop tôt et à ceux qui accusent le coup, à ceux qui souffrent.