T'écrire.
Mon
petit papa,
Aujourd’hui,
ça fait plus de 7 ans et demi que je vis sans toi. Les premiers mois ont été
les plus difficiles. J’avais encore tellement de réflexes… J’ai dû réapprendre
à vivre, sans toi. J’ai souffert énormément, et puis le temps a apaisé ma
souffrance, du moins c’est ce que je pensais. Mais comment j’aurais pu savoir,
avec aussi peu de recul, ce que je ressentais vraiment. J’étais perdue dans une
vague de douleur, de regrets, de question, et de manque. Oh, le manque. Si tu
savais comme tu m’as manqué, et combien tu me manques encore chaque jour, même
après si longtemps…
Au
début, je ne savais plus comment vivre, comment me lever chaque matin, comment
rire, … et puis petit à petit, avec l’aide de personnes formidables, j’ai fini
par me relever. Avec beaucoup de temps, j’ai même eu envie de retrouver cette
joie de vivre que j’avais, avant, quand tu étais là. Cette envie de faire et
dire des conneries sans arrêt, de faire rire les gens comme tu me faisais si
souvent rire. J’ai eu envie de garder tout le bon que tu m’avais donné. D’être,
comme tu l’étais, une oreille attentive et compréhensive pour les gens que
j’aimais. De voir le bon dans tout et tout le monde, comme tu le faisais,
parfois au détriment de ton propre bien-être. Bref, j’ai essayé de te rendre
fier. Seulement j’évoluais dans un contexte compliqué, et au lieu de me
relever, j’ai transféré ma douleur vers un problème différent, et je me suis
enfoncée dans ces conneries parce que l’espace d’un instant, d’un centième de
seconde, ça me faisait du bien, et ça comblait un manque, sans doute. Le manque
de toi. Quelques années plus tard c’est plus facile d’en parler, de prendre du
recul et de comprendre ce qui s’est réellement passé. Mais à l’époque, c’était
juste un enfer dont je ne me voyais pas sortir un jour. Et puis comme s’il y
avait une sorte de logique dans tout ça, chaque étape que je traversais dans la
vie me ramenait à toi, et comme tu n’étais pas là, tout me ramenait à ça. Des
démons que je ne comprenais qu’à moitié jusqu’à aujourd’hui. Il m’aura fallu
sept ans et demi, et encore, qui sait si ce que j’ai compris aujourd’hui n’est
pas une énorme boulette de plus ? Mais je pense que cette fois-ci, j’ai
fait ce qu’il fallait pour ne pas me tromper. Pour me relever et aller de l’avant
pour de vrai. Cette fois-ci papa, je te rendrais vraiment fier, si seulement tu
pouvais me voir…
J’ai
passé des années de ma vie à me punir, à m’infliger des souffrances
supplémentaires parce que quelque part dans mon petit cerveau abimé je pensais
que ça me faisait du bien. Enfin, je ne pensais pas, d’ailleurs, c’est là tout
le problème. Je ressentais un manque et il fallait bien le combler… Seulement
après quelques années j’ai fini par me rendre compte que je m’étais enfoncée
dans des habitudes néfastes, et que vu l’opinion que j’avais de moi, tu
n’aurais certainement pas approuvé.
Alors
je me suis trouvée face à ce choix : continuer à vivre une demi-vie ou me
prendre en main et changer complètement ma vision des choses, mes habitudes, et
mon style de vie. En juillet dernier, papa, j’ai décidé de ME rendre fière.
J’ai décidé d’arrêter d’être cette personne qui se complait dans son mal-être
et qui se plaint sans jamais rien faire. J’ai voulu changer mon comportement
pour enfin avoir une vraie raison d’être fière de moi, et de te rendre fier de
moi. J’avais tenté à plusieurs reprises de me prendre en mains, mais j’avais
toujours quelque chose qui me faisait échouer. Peut-être un mal psychologique
lié à ton départ, peut-être les conséquences du mauvais traitement des autres
adolescents à mon égard, peut-être simplement de la faiblesse de ma part, ou
peut-être tout ça en même temps. Toujours est-il qu’avant cette année, j’avais
toujours échoué. Mais pas cette fois, cette fois, je me suis lancée avec des
règles très importantes : 1) Ne pas se plaindre de choses que je ne fais
rien pour changer, 2) Plus d’excuses et 3) Ne plus jamais abandonner. Et cette
fois-ci, papa, je te le dis des mois (presque un an après), j’ai réussi.
Cette
nouvelle force, je l’ai trouvée grâce à toi, à tout ce que tu m’as apporté,
tout ce que tu m’as appris, et tout ce qui est resté de toi après ton départ.
Je la dois à ta mère, ta sœur et ta nièce qui sont et seront toujours des
modèles pour moi et sans doute les meilleurs morceaux de toi qu’il me reste. Elles
qui ont toujours été là pour moi, pour m’écouter, me comprendre, me soutenir et
m’aider à avancer. Je la dois à ton fils qui est une personne absolument
extraordinaire, un peu grâce à toi, un peu à cause de toi, mais surtout comme
toi. Ton fils qui est la personne la plus honnête et vraie que j’aurai la
chance d’avoir dans ma vie, et qui m’a toujours poussée, chaque seconde de
chaque jour, à devenir la meilleure version de moi. Je la dois à maman, qui est
un exemple de force et de courage et qui sera toujours le charbon de ma
locomotive. Je la dois à Vanessa, cette amie qui est finalement bien plus
qu’une amie, comme tu l’avais compris, et qui sera toujours là pour moi, sans
jugement et sans compromis. Cette force, enfin, je l’ai trouvée un peu dans ma
nouvelle vie, dans cette personne que tu n’auras malheureusement jamais
l’occasion de rencontrer : mon amour, Sam. Un peu comme toi par moments,
mais aussi totalement différent, il m’a apporté un soutien inconditionnel depuis
le tout premier jour et c’est l’une des seules personnes à qui je sais pouvoir
confier mon cœur sans douter une seconde qu’il ne le brisera jamais.
J’ai
alors commencé par des petits exercices, des repas plus équilibrés, trouver la
motivation où je pouvais, essayer de nouvelles choses, toujours rechercher de
nouvelles solutions à mes problèmes, et toujours faire les choses dans mon
intérêt. Avec le temps, je me suis éduquée, j’ai compris énormément de choses
et ça a forgé la force de caractère qui m’a permis de ne jamais abandonner. Et
maintenant, presqu’un an plus tard, combien je suis contente, combien je suis
fière de n’avoir rien lâché… J’ai sauté sur l’occasion d’un gros changement
dans ma vie (le début de ma carrière, la dernière année de mes études…) pour
changer du tout au tout. Et pour une fois, j’ai pu utiliser un grand changement
pour me faire du bien. Je ne sais pas pourquoi cette fois-ci a fonctionné,
peut-être qu’avant ça je n’étais pas prête, peut-être que j’ai lu, vu ou
entendu quelque chose qui a fait comme un déclic, je n’en sais rien, et je
m’en fiche un peu, l’important c’est que je me suis remise de ces démons.
Aujourd’hui,
je dis au revoir. Au revoir au manque de toi qui m’a fait tant de mal, qui a
déclenché tant de choses négatives dans ma vie. Et je t’accueille à bras
ouverts dans ma nouvelle vie. Dans ma nouvelle vie, tu me manques toujours,
mais un peu moins, puisque je sais que chaque changement positif, chaque
réussite, chaque petite victoire, je la dois à la volonté de vivre que tu m’as
transmise, aussi bien de ton vivant que depuis que tu es parti.
Je
vais te rendre fier parce que je vais faire pour moi tout ce que j’aurais aimé
que tu fasses pour toi, parce que je vais rester ta fille, mais aussi devenir
bien plus que ça. Alors je te dis à bientôt ; quand je commencerai à
douter de moi, quand je devrai courir un peu plus longtemps, quand je n’aurai
pas la motivation, quand je douterai, je sais que tu seras là, dans mon esprit
et dans ma vie, pour m’aider à continuer. Parce que j’ai peut-être perdu mon
papa, mais je n’ai pas perdu mon P.A.P.A.
« Profiter,
Aimer, Partager, Avancer »
Ta fille qui t’aime.
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